CABOSSE
Holy shit ! ça faisait un moment que je ne m'étais pas pris une telle mandale dans la gueule avec un bouquin. Quand je dis une mandale, c'est une vraie hein, pas une giflette qu'on reçoit du bout des doigts et qu'on oublie vite. Non non, la vraie beigne, de celles qui vous laissent avec des dents déchaussées et un arrière goût de métal dans la bouche.
Autant vous le dire tout de suite : il y a un avant et un après la lecture de ce livre. Vous allez passer votre temps à vous bidonner, à rire aux éclats à vous en faire péter les côtes flottantes. Si jamais vous aviez à l'esprit de le lire tout seul au resto, dans un bar, aux WC ou sur un banc public (la liste n'est évidemment pas exhaustive, libre à vous d'être plus imaginatifs) vous allez passer votre temps à glousser nerveusement, avant de vous esclaffer bruyamment et risquer de provoquer un grand étonnement dans l'assistance.
Mais surtout, vous allez vous dire : putain (ou purée, fichtre, sacrebleu, diantre... pour les plus chastes d'entre vous) qu'il est doué le bougre (l'auteur hein, pas le libraire). Non seulement il est fendard, mais en plus il écrit sacrément bien. C'est pas compliqué : il fait pas dans la surenchère, il en fait pas des caisses pour vous montrer à quel point c'est un caïd de la rhétorique. Il va direct à l'essentiel et fonce telle une grosse cylindrée sur les autoroutes allemandes.
Il est pas là non plus pour vous dégueuler une Encylopedia Universalis et vous faire sentir à moitié con parce que vous pigez pas un dixième de ce qu'il a pondu. Non non, avec Benoit, vous gambergez pas, vous avalez les 270 pages de ce fantastique roman noir avec l'avidité d'un chat qui n'a pas vu sa gamelle depuis près d'une semaine (je sais pas si vous avez des chats à la maison, mais nous on en a 3, et ils nous mettent déjà bien à l'amende si on a ne serait-ce qu'une heure de retard sur l'ouverture matinale de la porte d'entrée).
A ce point de la chronique vous allez me dire : il est bonnard le libraire, il nous sort son laïus et dit que c'est un bon livre et qu'il faut l'acheter, ok, mais bon il parle de quoi son bouquin ???
Eh bein comptez pas sur moi pour vous déballer l'histoire, mais voilà un peu de la recette magique du sorcier Philippon : un road-movie inoubliable, des personnages monumentaux (dans tous les sens du terme), une histoire sacrément bien ficelée et rythmée, des scènes - un tantinet - cul qui font relever allègrement le thermomètre par la sexualité qu'elles contiennent, un sens inouï de la répartie et des dialogues (en tout état de cause, je le soupçonne d'être un fils caché de Michel Audiard), mais aussi et surtout des qualités humaines comme on les aime : la générosité, la bonté d'âme, l'amour, dans ce qu'il a de plus pur et passionnel, et une vraie humanité, de celle qu'on ne peut voir que quand a ramassé des galères de la vie à coup de tractopelle.
Et puis je m'en voudrais de l'oublier, mais de ce livre se dégage une liberté particulièrement salvatrice, un air frais et vivant dont on se remplit les poumons par hectolitres.
Allez, je ne peux pas résister au plaisir de partager avec vous un petit extrait particulièrement savoureux (ça se déroule chez Berthe, la mamie la plus punk de la galaxie) :
- C'est pas parce que t'as une sale tronche que t'as pas une bonne tête.
Alors celle-là, on la lui avais jamais faite. Une mise en perspective de toute la problématique de sa vie résumée par une phrase choc d'une centenaire armée d'un Luger. Souvent, quand tu crois avoir compris quelque chose, y a un événement qui pointe son nez sur la route qui te fait regarder dix degrés sur le côté. Une perspective différente de dix degrés, et tu réalises qu'en fait, t'avais pas bien vu, qu'au bout du chemin, tu croyais que c'était un mur, ben non, y a un embranchement, avec une ouverture. Et tu l'avais pas vue, parce que tu regardais dix degrés trop à gauche. Alors forcément, quand t'as cent dix ans, plus de dents et que t'es à moitiés aveugle, la vie, tu la vois à trois cent soixante degrés. Surtout celle des autres. Tu leur fous en l'air leurs perspectives à coups de sagesse imparable, et tu finis de les achever par un brin d'humanité :
- Vous prendrez bien un peu d'soupe tous les deux ? ça creuse de voiler les 4L des vieilles, hein ?
Vaincu par K-O, le petit coeur de Roy s'écroule au sol, fondu. Guillemette, elle, réagit plutôt de façon solaire. Son sourire irradie tellement qu'on voit dans la rue comme en plein jour. Faut qu'elle fasse gaffe, ils vont attirer l'attention, à force.Pour ce premier roman (oui oui, c'est assez agaçant), Benoit Philippon nous envoie valser directement dans les cordes, non sans avoir décoché le plus bel uppercut de l'histoire de la boxe littéraire, mais après déposé un petit bisou sur le front en nous disant "T'inquiète, ça va aller...".
Vous l'aurez compris : ce livre est une bombe, que vous vous devez de lire de toute urgence (mais va falloir quand même poireauter jusqu'au 8 septembre, date de sortie officielle du livre).
Du fond du cœur, et même si j'en ramasse encore mes molaires, merci Benoit.





Prix éditeur
18,00 €

24,90 €
19,80 €
15,00 €
12,50 €
22,00 €
Livres
Newsletter
Inscrivez votre adresse mail pour vous tenir au courant de l'actualité de la librairie :